Dans la famille des thés wulong chinois, les thés des rochers de Wuyishan, dans la province du Fujian, sont fascinants.
D’abord parce que ces thés et les théiers proviennent d’un site extraordinaire. Le parc de Wuyishan (le parc du mont Wuyi) est réputé pour sa biodiversité, ses paysages pittoresques et ses formations géologiques uniques. D’une superficie de 107 000 hectares, il a été classé au patrimoine mondial de l’UNESCO en 1999. Hérissé de sommets et creusé de gorges, il abrite une intégrité paysagère et écologique exceptionnelle. Montagnes, rivières, forêts, mais aussi sites archéologiques et historiques majeurs, vestiges d’anciennes civilisations. On y a répertorié plus de 3 700 espèces de plantes et plus de 5 000 espèces d’insectes et d’animaux (tigres, léopards, daims, faisans, papillons endémiques…).
Au sein du parc, on compte également 99 rochers et 36 pics, qui disparaissent souvent dans la brume. Sur chacun d’entre eux pousse un thé. Les fameux thés des rochers (yancha en chinois 岩茶). On y dénombre une centaine de variétés de théiers.
Chaque yancha porte le nom de son rocher et chaque rocher est célèbre grâce à son thé. Et ce, depuis la dynastie des Tang (618-907), qui a initié ici la culture du théier. Des thés post-torréfiés plusieurs fois qui apportent la richesse minérale des terres volcaniques (potassium et manganèse en particulier) et une concentration en antioxydants et en théanine.
Liste non exhaustive des yancha :
- Bai Ji Guan (“la crête de coq blanche”)
- Tie Luo Han (“l’arhat de fer”)
- Shui Jin Gui (“la tortue d’eau dorée”)
- Ban Tian Yao (“la moitié du ciel”)
- Da Hong Pao (“la grande robe rouge”)
- Shui Xian (“la fée des eaux”)
- Rou Gui (“cannelle”)
- Yu Qilin (“la licorne de jade”)
- Jin Fo (“le bouddha d’or”)
Les plus célèbres sont les quatre premiers thés de la liste. Ce sont les plus prestigieux. En Chine, on les désigne sous le nom de Si Da Mingcong 四大名丛 (“les quatre grands mingcong”). Les mingcong (littéralement “bouquet célèbre”) sont des variétés de théiers directement issus par graines des théiers des rochers d’origine. Il existe aussi des variétés plus récentes, répertoriées par exemple dans les années 1980 (telles les Shui Xian ou les Rou Gui).
Il convient de distinguer aussi les authentiques thés des rochers. C’est-à-dire ceux produits à l’intérieur même de la réserve de Wuyishan, sur un type de sol particulier (très minéral) et selon un processus de transformation très sophistiqué. Ils atteignent des prix élevés. Alors que les thés produits à l’extérieur de Wuyishan proviennent de sols moins riches en minéraux. Ils sont moins chers et offrent toutefois des qualités très convenables, surtout pour ceux produits à la périphérie immédiate du parc.
La saison la plus prisée par les amateurs est celle du printemps, et également celle de “l’hiver” (octobre).
Ce sont des thés que l’on infuse dans une eau très chaude (95°C environ), dans un bol à couvercle (gaiwan) ou dans une petite théire en terre cuite (comme la terre de Yixing). En fonction de la qualité, les yancha peuvent être très endurants. Les mêmes feuilles de thé peuvent supporter un grand nombre d’infusions successives sur une journée (de 3-4 infusions, jusqu’à 9).
Au moment de la dégustation, les connaisseurs jugeront de la pureté, la transparence de la liqueur. Mais aussi de son parfum, de sa vivacité, de son arrière-goût sucré et de ses notes minérales. C’est ce que les Chinois appellent la “rime de roche”.